HOMMAGE A MADAME GILLET, 100 ANS le 29 janvier 2022 !




Il est des personnes qui, par leur discrétion, ne font jamais parler d’elles, et pourtant leur vie est semée de bonheur mais aussi d’épreuves , qu’elles assument en regardant toujours devant, vers l’avenir.
C’est le cas de Raymonde Madame GILLET… Nous allons vous raconter en quelques épisodes un peu de son siècle de vie et ainsi lui rendre l'hommage qu'elle mérite …
Raymonde est née le 29 janvier 1922 au 27 rue Croix Blanche à Saint Laurent de Mure, alors petit village de 700 âmes… Elle est la fille unique de Louis BAILLY, lui-même né dans notre village en 1884 et de Francine ALLAMANCHE née en 1879.
C’est le docteur MARITOUT qui la fit naître, puis le docteur VACHER devint le médecin de la famille, et notamment quand Raymonde à 14 ans se versa malencontreusement une casserole de soupe sur la jambe et dû être soignée pour brûlures profondes durant trois mois !
Francine était couturière et Louis Charcutier à Lyon, mais tous deux, comme beaucoup de personnes à cette époque, étaient aussi cultivateurs, ce qui permettait d’avoir toujours de quoi manger.
A trois ans et demi, Mademoiselle COMMANDEUR , l’institutrice, pris avec elle Raymonde dans la classe des petits … Elle se souvient bien de ses camarades : deux filles qui ne sont plus là, et Jean François Crassard, Jean Bourget, Julien Marron de Poulieu (surnommé ensuite Capitaine Crochet car il s’était blessé avec une ampoule électrique et sa plaie s’était tant infectée qu’on dû lui couper la main ! ») …
Elle fit ensuite toute sa scolarité avec Mademoiselle PRAT, dont beaucoup d’entre vous se souviennent.
Et elle ne quitta l’école qu’à l’âge de 13 ans, le certificat d’études en poche : belle performance en 1935 ! Elle l’avait passé à Heyrieux, nous dit-elle , St Laurent de Mure faisant partie à ce moment là du canton d’Heyrieux.
A cette occasion, ses parent lui offrirent un vélo : elle s’en souvient bien… un vélo « vert jaspé » nous précise-t-elle, avec les yeux qui pétillent encore de sa joie de l’époque, un vélo acheté chez FULGOR à Lyon .
La marque « Cycles Fulgor » date de 1926, et était la propriété d’Edmond VESIN à Lyon, qui avait aussi la marque de bicyclettes « EVE ». A ce moment-là, point de voiture : l’aller-retour à Lyon se fit en autobus, avec les bus ALBION, qui allait à Frontonas.
Malheureusement, elle ne put poursuivre ses études car il fallait aider à la ferme, la guerre n’était pas loin, et les mains de l’adolescente n’étaient pas de trop dans les champs de Planaize où, d’ailleurs, on se rendait à pied !
1935 : Raymonde Gillet a donc passé son certificat d’études à 13 ans et va ensuite travaillé à la ferme et aux champs…
Plus tard, grâce à Mademoiselle ESCOFFIER, modiste du village, Raymonde travaille le « tulle » et « pose des mouches » avec son petit ciseau, c’est-à-dire des « petits ronds » sur le tulle qui allait être utilisé pour fabriquer les voilettes de ces dames en ce temps-là.
C’était une travailleuse notre Raymonde, jamais restée sans rien faire… Elle travailla ensuite pour l’usine « Martin Velours » installée sur notre village (sur les terrains où se trouvait l’entreprise SAS démolie maintenant). Elle tenait la fonction de « dévideuse ».. Savez-vous ce que cela signifie ??
Raymonde était donc dévideuse chez Martin Velours, c’est-à-dire qu’elle prenait des écheveaux de soie et elle les « dévidait », les "défaisait" pour que ces fils s’enroulent sur une bobine.
Mais à la fin des années 1930, malheureusement, le chômage lui fit quitter son emploi.
Elle fut envoyée à Tignieu, dans une autre usine, dont les propriétaires étaient la Famille BIETRIX bien connue à St Bonnet de Mure, famille qui fut propriétaire du château, actuelle Mairie de St Bonnet.
Dans cette usine, Raymonde y restait toute la semaine : il y avait dortoir et réfectoire.
En ce temps-là pas question de revenir tous les soirs à la maison, on ne pouvait pas se le permettre. Raymonde rentrait donc uniquement le samedi et le dimanche à St Laurent de Mure, son village si cher à son cœur et où elle vit depuis cent ans !
Au moment où éclata la deuxième guerre mondiale, Raymonde revint définitivement à St Laurent : il y avait du rationnement partout. Mais heureusement pour sa famille, la ferme et les champs leur permettaient de se nourrir.
Ses parents aidaient beaucoup les Laurentinois, notamment les personnes âgées en leur donnant de la nourriture (pommes de terre, et autres légumes), où en allant les aider à chercher le charbon nécessaire pour se chauffer l’hiver, une famille avec un cœur gros comme ça !
Des souvenirs de cette époque restent gravés dans sa mémoire, et notamment l’épisode de 1944 où deux allemands, qui étaient stationnés à St Laurent, pointèrent dans son dos leurs fusils pour exiger une « scie » qu’elle n’avait pas ! Non, elle n’oubliera pas de sitôt,

Son père était aussi fossoyeur et c’est « Brico » le coiffeur pour homme qui l’aida dans cette difficile tâche notamment durant la guerre.
Louis BAILLY fit partie également des hommes qui furent retenus par les allemands dans le garage ARMANET, près de l’hôtel de Savoie, aujourd’hui disparu. Un épisode difficile que nous vous avions déjà raconté…
Quand la guerre fut finie, on fêta cela bien sûr. Raymonde se remémore ces deux jours de festivités, deux jours de bal où le « pick-up » installé sur le balcon de la mairie diffusait de la musique à fond.
Et que dire des Canadiens qui descendirent les pavés avec fracas en distribuant devant la mairie des chocolats et des chewing-gums en veux-tu en voilà à tout le village réuni pour l’occasion.
Ce fut lors d’un bal en 1945, dans le garage ARMANET, que Raymonde qui dansait avec un aviateur stéphanois vit arriver un jeune homme plein de fougue dire à son cavalier : « Laisse la, Je veux me marier avec elle ». ..
Lorsque Raymonde vit ce jeune homme lui faire cette déclaration, elle sut que c’était lui, l’homme de sa vie. Car il faut vous dire qu’elle le savait ! Comment nous direz-vous ? et bien nous allons vous l’expliquer…
Lorsqu’elle était plus jeune, il arriva à Raymonde d’aller à Lyon en bus accompagnée de son amie, une fille Ossana (nous ne sommes pas sûrs de l’orthographe), des italiens venus s’installer à St Laurent de Mure.
Et elles allèrent voir une voyante, une vraie, à trois reprises d'ailleurs, une voyante pas comme celles que l’on voit aujourd’hui, une professionnelle, cela se faisait bien à l’époque… et Raymonde nous assure que toutes les prédictions à son sujet se réalisèrent !


L’hiver 1946 fut rude, mais comme beaucoup d’hivers à cette époque-là. Il y eu 30 cms de neige : le traineau en bois fut attaché au cheval pour pouvoir déneiger, on faisait avec les moyens du bord !
Raymonde se maria donc avec André Joseph Henri GILLET , né, lui, le 6 janvier 1921 à La Verpilliere. La cérémonie eu lieu le 19 janvier 1946 à St Laurent de Mure. Ce fut Marcel Baconnier, maire de l’époque qui les maria. Les témoins du mariage furent :
- Antoine Debourcieu, charron, époux de Joséphine Bailly
- Et Véronique Vidaud, tante d’André, habitante de Satolas et Bonce.
André, durant la guerre, fut envoyé avec son frère en camp de travail en Allemagne, durant deux ans et demi, battu et maltraité comme bien d’autres.
Des souvenirs douloureux et témoignages d’une histoire où l’Homme était devenu fou !
Son père, M. Gillet, était de Satolas, et y exerçait le métier de Maréchal Ferrand.
Ce joli couple eu cinq enfants :
- Yvette,Marie-France TARDIF-GILLET 1947
- Rolande, Anne, Suzanne GILLET 1950-1965
- Edmond,André GILLET 1953
- Isabelle, Raymonde GILLET 1955
- Nicole, Yvette GILLET 1960
Pendant que André travaillait chez BERLIET, Raymonde fit un tas de « petits boulots » car la famille était nombreuse :
- Elle travailla également un an chez Berliet
- Elle fit du travail à domicile : assemblage de pièces électriques, assemblage de livres éducatifs, décoration de tulle, enfilage de perles (notamment pendant la guerre) pour les couronnes mortuaires, des ménages là où elle trouvait.
Il faut dire qu’en ce temps-là, St Laurent de Mure comportait beaucoup de résidences secondaires, car les gens « de la ville » venaient en vacances « à la campagne », et nous n’étions pas bien loin de Lyon ! St Laurent de mure était donc un village apprécié : on était "à la campagne"...



En discutant avec Raymonde, des souvenirs lui reviennent encore…
Elle se souvient aussi de la rue des Pavés : « il paraît qu’on a laissé les pavés sous le goudron » nous dit-elle !
Elle tombait souvent sur les pavés, les genoux écorchés, elle rentrait chez elle tant bien que mal…
Elle se souvient que la vie était dure, mais qu’il y avait « plus d’insouciance » dit-elle …
Elle se souvient aussi des veillées en famille : on chantait, on racontait des devinettes, c’était à celui qui trouvait la bonne réponse le premier.
Elle se souvient du ramassage des patates : « c’est qu’on ramassait entre 2 000 et 3 000 kgs chaque année, car mon père en donnait à ceux qui n’avaient rien ! » nous dit-elle très fière… « sans compter les rutabagas » !
MERCI Raymonde de nous avoir partagé ce moment,
MERCI de nous avoir reçues si gentiment,
MERCI de permettre à tous nos lecteurs d’avoir un peu de votre vie dans leur cœur,
MERCI de votre sourire et de votre bonne humeur, une VRAIE LEÇON DE VIE POUR TOUS !


Photo prise lors de ses 90 ans, entourée de sa famille et de ses amis






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