PATRIMOINE ET HISTOIRE !  

« ON EST DE CHEZ BERLIET »




« Il ne faut voir, dans l’effort que je fais, que mon ardent désir de voir enfin se réaliser le rêve de toute une vie : la création d’une vaste et florissante cité industrielle ». Telle était l’ambition de Marius Berliet

Marius Berliet est né en 1866 à Lyon, dans le quartier industrieux de la Croix-Rousse. Sa famille paternelle est originaire du Nord Dauphiné où de nombreuses générations ont travaillé comme laboureur. Son grand-père a quitté la campagne au début du XIXème siècle et a trouvé un emploi d’ouvrier-tulliste à Lyon. Son père a créé un modeste atelier de tissu pour coiffes de chapeau. Sa mère Lucie Fabre est méridionale.

Marius Berliet naît dans un milieu catholique conservateur de Lyon, la Petite Eglise, et est passionné de mécanique. Il construit son premier moteur en 1894, crée sa première voiture la “Pantoufle” en 1895.

Fin 1899, Marius Berliet a construit six voiturettes et emploie quatre ouvriers. Fin 1902, l’usine de Monplaisir fabrique dix à quinze voitures par mois et emploie 250 personnes. Dès 1903, de grosses voitures à quatre places, capables de rivaliser avec les Rochet-Schneider, sortent des usines Berliet.

En 1912, une voiture de série Berliet remporte l’un des premiers rallyes Monte-Carlo. En 1913, 3 500 voitures sortent de l’usine de Monplaisir, qui occupe alors 48 000 m² et emploie 4 000 ouvriers.

Déjà avant la construction de la cité ouvrière Berliet à Saint-Priest en 1919, cette entreprise prestigieuse qui paye bien, forge son identité auprès des employés : «  On est de chez Berliet. »

Et de nombreux Laurentinois se font embaucher dans cette nouvelle usine où l’on est bien « soigné », où les avantages pour la famille sont nombreux et où l’on fait partie d’ une vraie équipe de travail soudée et amicale : car pour beaucoup, intégrer BERLIET était une chance !





L’Usine construite pour accroitre la production destinée à l’Armée pendant la première guerre mondialea été pensée dès l’origine dans son ensemble. C’est un site industriel complètement intégré, sur le modèle des usines américaines de fabrication de véhicules en série : construction rationnelle incluant la préservation de la nature (plantation d’arbres, ferme).

 Il a continué à évoluer et à s’agrandir tout au long du siècle sur les terrains que Marius Berliet avait eu la sagesse d’acquérir pour l’évolution de son usine. Marius Berliet a su s’inspirer de ce qui se faisait de mieux à l’époque dans la construction des bâtiments industriels, ainsi la circulation souterraine de l’usine Rochet-Schneider par Louis Payet en 1900.

Avec les bénéfices des marchés d’obus et de camions pour l’Armée Française exécutés dans l’usine de Lyon-Monplaisir, Marius Berliet va anticiper les besoins de la Défense Nationale dans l’effort de guerre en augmentant considérablement ses moyens de production. Par le biais des sociétés Trible créée le 18 novembre 1915 puis la SIRI (Sté Immobilière du Rhône et de l’Isère), il acquiert à partir de 1916 près de 400 ha, soit 732 parcelles de terrains agricoles pauvres des communes de Vénissieux et Saint Priest, regroupées au moyen de 340 actes notariés.

Il construit à partir de la même année les premiers bâtiments d’une usine complètement intégrée. La construction des ateliers se fera sur plusieurs tranches en même temps que sont creusés les égouts et les canalisations pour l’alimentation en énergie et fluides, et qu’un château d’eau de 200 mètres cubes d’eau est érigé. Fonderie d’acier, de fonte, d’aluminium, forge avec sa centrale vapeur, atelier d’emboutissage, laboratoires de contrôle, bureaux administratifs, atelier d’usinage et de montage sont construits dans des proportions gigantesques pour l’époque et selon une organisation méthodique.




 

L’application des méthodes de Taylor, un ingénieur américain et promoteur le plus connu de l'organisation scientifique du travail,  permettra d’assurer le montage quotidien des 40 CBA à partir de 1917 et des 15 chars en 1918, qui assureront la victoire. Pour accroître la production, Marius Berliet achète une aciérie ultramoderne à Pittsburgh aux Etats-Unis.

Les bâtiments sont dès l’origine séparés les uns des autres par des avenues de 30 mètres de large se coupant à angle droit. Ils sont sillonnés par 18 km de voies ferrées à écartement normal et des voies de 0,60 m pour les locotracteurs. Cette nouvelle usine sera reliée directement à celle de Monplaisir par le nouveau boulevard des Etats-Unis percé en 1919.

C’est après la guerre, en 1919, que débute la construction des logements. Le premier bâtiment est un immeuble de plusieurs étages, dit « Grande Maison ». Ses appartements sont plus particulièrement réservés aux célibataires et aux jeunes ménages. Des commerces occupent le rez-de-chaussée.

Le principe de construction principal des maisons qui suivent est dit du carré de Mulhouse (né en 1853). Chaque villa regroupe quatre logements répartis sur chaque angle. Elle est implantée au milieu d’une parcelle elle-même divisée en quatre lots où chaque locataire pourra cultiver son jardin.

Une école est construite en même temps que la cité.

En 1925, la Cité rassemble 250 familles, principalement des personnels d’astreinte de l’entreprise. Les voies se coupent à angle droit et sont indiquées par des lettres et des chiffres.

Les bâtiments d’habitation de la Cité Berliet étaient dessinés par le Bureau d’Etudes de l’entreprise sous la direction de Marius Berliet.

 

La cité est bombardée par les avions américains dans la nuit du 2 mai 1944. Fort heureusement, elle avait été évacuée auparavant. Elle sera reconstruite et étendue à partir des années 50, soit 356 logements.




D’année en année, il fait construire autour des usines des habitations, une école, une crèche et même une ferme dédiées à ses employés. C’est la fameuse “Cité Berliet”. Une vision qui contribuera à sa notoriété qui grandit au rythme de ses affaires.

Une notoriété toutefois entachée au sortir de la Seconde Guerre mondiale : Marius Berliet, accusé d’avoir fabriqué des camions pour l’armée allemande sous l’occupation, voit ses usines placées sous séquestre à la Libération. Elles seront restituées à ses descendants à sa mort en 1949.

Quand le conseil d’État rend l’entreprise à la famille Berliet en 1949, elle compte alors 7 500 personnes qui fabriquent 17 véhicules par jour. La France a besoin de camions pour acheminer les marchandises. et le transport routier connaît un essor sans précédent (poids lourds, camions, autocars).

Entre 1950 et 1974, la production décuple quasiment. Le célèbre T 100, camion le plus puissant du monde de l’épopée saharienne des années 1950 (Algérie en 1957, Maroc en 1958) a été conçu au sein des ateliers de Monplaisir, alors que du côté de la rue Audibert-et-Lavirotte, on fabrique plutôt des pièces détachées et des groupes électrogènes.


C’est son fils Paul qui a  succédé à Marius. Une nouvelle ère s’annonce avec des exportations à l’international. C’est aussi l’ère d’un ballottement de la marque Berliet, de propriétaire en propriétaire.

Dans les années 1960, la concurrence pousse Berliet à s’adosser à un groupe plus important. Ce sera d’abord Citroën, alors propriété de Michelin. Puis Peugeot, qui rachète Citroën et rétrocède le constructeur lyonnais à l’État qui décide du rattachement de Berliet à la Régie Renault, en vue d’une fusion avec sa branche poids lourd : la Saviem.


En 1975, Automobiles M. Berliet compte alors un effectif de 24 000 personnes. L’Etat décide du rattachement de Berliet à la Régie Renault. En 1978, Berliet devient Renault V.I. après absorption de Saviem. En 1980 disparaissent les marques Berliet et Saviem au profit de la marque Renault,  le sceau de Berliet disparaît des calandres, au profit du losange.


Depuis, Renault a cédé 100 % de RVI au groupe suédois AB Volvo en 2001, en échange d’une prise de participation. Par soucis de cohérence marketing, l’entreprise est rebaptisée “ Renault Trucks ”.

L a Fondation de l’automobile Marius-Berliet, créée en 1982 par ses descendants, s’est donné la mission de conserver et valoriser le patrimoine de l’automobile lyonnaise et du camion français. Un travail d’envergure dans la mesure où Lyon et la région ont vu naître 150 marques de camions ou de voitures au XXe siècle.






 

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