LES GENS D’ICI !

TROIS CONSCRITS DE St-LAURENT-DE-MURE
MORTS POUR LA FRANCE
LE DIMANCHE 30 AOÛT 1914 EN LORRAINE A GERBEVILLER





Par l'assassinat d'un archiduc à Sarajevo et un complexe jeu des alliances, tous les hommes de France partent faire la guerre à l'Allemagne, ainsi que ceux de St Laurent de Mure laissant derrière eux : femmes, enfants, récoltes, travail, ...
Gerbéviller, c'était un bourg paisible de 1600 habitants. Personne n'aurait cru qu'en août 1914, il deviendrait un véritable symbole des crimes de guerre perpétrés par les allemands en Lorraine.
C'est le 24 août 1914 que tout bascula. En effet, une 50ène de chasseurs français réussirent à bloquer l'accès aux troupes bavaroises cherchant à traverser le point, ce qui ne resta pas sans conséquence. De nombreuses pertes du côté allemand furent à déplorer. Par vengeance, les allemands décidèrent de détruire 80% de la ville de Gerbéviller.
A St Laurent de Mure, la grande hécatombe de 14-18 avait débuté avec le décès du soldat Lucien REY le 27 août, suivi de celui du Capitaine Louis Cesar CHARRASSE le 28 août.
Ce matin du dimanche 30 août à Gerbéviller en Lorraine suivra le décès de trois enfants de notre commune.
Bien qu'appartenant à trois unités différentes, ces trois hommes de la classe 1906 tomberont au même moment, sur le même champ de bataille ; il s'agit des soldats :
- Jean MATHAN du 222° RI --- inhumé Nécropole Nationale de Gerbéviller n°415
- Jean PARENT du 199° RI --- disparu au combat
- Louis Antoine VIGNE du 99° RI --- inhumé Nécropole Nationale de Gerbéviller n° 472
Ces trois soldats de la commune faisaient partie de la 2° armée du Général Edouard de CASTELNAU qui repoussera la 6° armée Allemande du Prince RUPPRECHT de Bavière, lors de la bataille pour la « Trouée de Charmes » (Meurthe et Moselle).
Sous la chaleur de ce mois d'août, après 15 jours sous le couvert des forêts de sapins des Vosges à la visibilité réduite, orages, pluies, brouillards matinaux, ravitaillements en vivres souvent manquants, pour cause de la rapidité des avancées, suivie de retraites, attaques et contre attaques,
désorganisation des unités, pertes énormes en hommes, soldats survivants ne sachant à quoi se rattacher, mais aussi vision du martyre de la population civile .
Au soir du 30 août 1914, le bilan est déjà bien lourd pour ces jeunes hommes venus du Nord Isère qui composent ces régiments du 299 RI et 222 RI.
Après ce premier baptême du feu, les chroniqueurs diront : « Que la confiance de la troupe est grande, et elle sait maintenant ce que c'est que bien se battre. Elle ne craint plus le boche ! »
Grâce à la lecture des documents de route de leurs régiments, l'Association Cartophile Muroise avait retracé l'ultime parcours, de St-Laurent-de-Mure à Gerbéviller de ces trois soldats de la commune Morts Pour La France...



* Jean MATHAN 222°

RI  (23° compagnie)  Matricule au corps  n° 1500

Le régiment est constitué à Bourgoin – il comprend 2 bataillons – commandement Lt Col GIRALT. -8 août – Le régiment quitte Bourgoin par voie de terre pour se rendre à Montmélian (73),
cantonnement aux Abrets, aux Echelles,à Vimines.

-11 au 20 août entrainement des hommes.

-20 août – Embarquement par voie ferrée pour se rendre en Lorraine, débarquement, Einvaux et Bayon.

-23  août – Creuse des tranchées vers Hausonville et la ferme Leumont.

-24  août – Prend contact avec l'ennemi qui continue son avance par  la trouée de Charmes.

-25  août – Participe à la contre attaque, mais reste en réserve derrière le 223° RI et le
36° Colonial – à 18 h marche en avant dans le bois de Chaibleu où il bivouaque.

-26  août – Reprend sa marche en avant de Lamath – progresse de 800 mètres sous les
bombardements – le soir atteint Remenonville.

-28 août – Le régiment relève le 299° RI qui franchit la Mortagne après une lutte acharnée.

-30 août – Dimanche, au matin avec d'autres unités le 222° RI attaque la position du « bois de la Paxe » il est arrêté par de nombreuses mitrailleuses placées en lisières qui causent de grands vides.


Note d'un témoin :l e 30 au matin, il y a un brouillard épais qui masque les Français,
instantanément le brouillard se lève, les laissant à découvert. Le régiment est obligé de revenir à son point de départ sous le feu de l'ennemi.

A 8 heures du matin, dimanche 30 août, c'est ici que s'arrête la vie de Jean MATHAN, 28 ans, marié un enfant, comme le témoignera le soldat de la 23° compagnie François THEVENON 30 ans de
St Laurent de Mure cité comme témoin du décès.

* Jean PARENT 299°
RI  Matricule au corps  n° 2647   
commandement Colonel PETITJEAN

-3 août – Mobilisation à St-Colombe-les-Viennes.

-7 août – Embarqué dans 2 trains est dirigé vers Chambéry (73) cantonnement à Montmélian, la Chavanne, Coise, Longevale... séjour jusqu'au 19 consacré à l'entrainement.

-20 août – Embarqué à destination de Besançon – arrêt à Charmes.

-22 août – Ordre d'organiser la défense de Bainville-aux-Miroirs.

-25  août – L'action s'engage à Roselieures.

-26  août – Engagement vers Remenonvilles – les premiers obus à la mélinite tombent – A
la nuit les troupes stationnent à la hauteur de la côte 285 à l'Est  du chemin de Remenonvilles à Géberviller –
nuit difficile pluie -  Reformation des
éléments de trois régiments confondus.

-30 août – Dimanche, brouillard au lever du jour – le régiment attaque les tranchées du « bois du haut de la Paxe » - à 300 mètres des lignes ennemi, il faut s'arrêter - un feu d'artillerie prend le régiment en écharpe – Pertes sérieuses.

C'est ici que s'arrête la vie de Jean PARENT 28 ans marié un enfant, son corps est porté disparu, le jugement de son décès aura lieu tardivement en 1920 au tribunal de Vienne, il n'y a pas de témoin du décès.


* Louis Antoine VIGNE
99° RI (2° bataillon Vienne)  Matricule
au corps  n° 02560 commandement Lt Col MARTINET

-6 août –  Vienne – A partir de 14 h, une foule énorme angoissée, mais calme et courageuse se presse sur le parcours de la gare aux marchandises pour saluer le 2° bataillon du 99° RI.

A 16 h départ du train – Lyon – Ambérieu – Bourg – Dole, halte repas.

-7  août – Le train continue sur Besançon – Belfort – Lure – Aillevillers, débarquement
à Epinal à 14 h

- 8  et 9 août – Séjour à Chéménil – Exercices

-10  août – Marche de nuit, direction la frontière – il fait chaud.

-11  août – Marche de nuit – fatigues.

-12  août – On entend le canon – c'est la rencontre avec l'ennemi.

-14  août – Aucun ravitaillement en vivres.

-15  août – Violents orages – trombes d'eau – froid.

-16  août – Pluie torrentielle – Sainte Croix et Sainte Marie aux Mines - Combats
extrèmement dur – Pertes sérieuses

-18 août – Trois jours de pluie.

-23  août – Retraite sur Saales, par St Blaise-la-Roche.


-24  août – Journée terrible – brouillard épais.-25 août – Reprise de l'offensive.

( Du 26/8 au 2/9 le journal de l'historique du 99 RI donne aucun emploi du temps.


-Le 26 août –

D'après le journal d'un témoin du 99 RI :

« - Grande désorganisation
– gaspillage d'effectifs – nombres d'isolés du 299° RI ne pouvant se rattacher à aucune compagnie où bataillon, et ne sachant que devenir – Hommes en provenance les plus diverses.)

C'est à ce moment que vraisemblablement, le soldat Louis Antoine VIGNE 28 ans isolé de son
régiment rejoint les unités engagées dans le secteur pour la défense de la trouée de Charmes à Gerbéviller.


L'acte de jugement du tribunal de Lyon n'est pas retranscrit intégralement sur les archives des registres en ligne de la mairie de Lyon 7°, et ne nous permet pas d'avoir certaines précisions sur le décès de cet enfant de St-Laurent-de-Mure Mort Pour La France.


Article paru dans le Progrès - 2012

Le 8 mai 1921, jour de la fête nationale de Jeanne-d’Arc, les Laurentinois se rassemblent à l’occasion de l’inauguration du monument aux morts élevé par souscription à la mémoire des enfants de la commune tombés pour la France.

 « La cérémonie qui nous réunit aujourd’hui est tout à fait triomphale. Oui ! Glorieux enfants de ce pays qui avez donné si généreusement votre vie pour la France, par vous victorieuse. Nous célébrons votre héroïsme en inaugurant ce monument élevé par vos concitoyens pour perpétuer votre souvenir », déclarera le maire Joannès Reverdet.

Il saluera également un « monument, si beau, si artistique grâce au goût et au talent de ces travailleurs de la pierre, anciens Poilus qui, si tôt démobilisés, ont repris l’outil et ont continué à l’atelier la fraternité de la tranchée ».

« En parcourant cette liste trop longue nous ne pouvons oublier que cette gloire est faite des deuils et des larmes de vos mères, de vos fiancées et de vos femmes, et le chant de triomphe s’achève en glas funèbre. Pouvons-nous ne pas songer, Mesdames, que les noms inscrits sur cette pierre sont ceux des êtres que vous avez aimés et dont la mort vous a laissées seules et désolées », dira Joannès Reverdet dans son discours.

Dans le cortège officiel, deux anciens Poilus, Jean-Pierre Gauthier et Léon Roy, procèdent à l’appel des morts, dont les noms sont à jamais inscrits sur le monument.

« La vie recommence ou plutôt elle continue. Les générations succèdent aux générations », conclura-t-il.







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